27/09/2019
Le rapport spécial « Océan et cryosphère dans le contexte du changement climatique a été approuvé le 24 septembre par les 195 pays membres du GIEC (groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat) .

1 – Il y a urgence à agir
Le réchauffement planétaire a déjà atteint 1 °C au-dessus des niveaux préindustriels, en raison des émissions passées et actuelles de gaz à effet de serre. Il existe un nombre considérable de preuves indiquant que ce réchauffement a de graves conséquences sur les écosystèmes et les populations.
Le dernier Rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) souligne qu’il importe de définir, de toute urgence, des mesures prioritaires opportunes, ambitieuses et coordonnées pour faire face aux changements durables sans précédent que subissent l’océan et la cryosphère. Le rapport met en lumière les bénéfices d’une adaptation ambitieuse et efficace au profit du développement durable et, à l’inverse, les coûts et les risques toujours plus élevés liés à l’inaction.
2- L’océan se réchauffe, devient plus acide et moins fécond
- L’océan a absorbé plus de 90 % de la chaleur excédentaire du système climatique. D’ici à 2100, il absorbera 2 à 4 fois plus de chaleur que pendant la période allant de 1970 à l’heure actuelle si le réchauffement planétaire est limité à 2 °C, et jusqu’à 5 à 7 fois plus, si les émissions sont plus élevées.
La fréquence des vagues de chaleur marines a doublé depuis 1982 et leur intensité augmente. Dans le futur, elles seront 20 fois plus fréquentes avec un réchauffement de 2 °C et 50 fois plus fréquentes si les émissions continuent d’augmenter fortement.
- L’océan a absorbé 20 à 30 % des émissions anthropiques de dioxyde de carbone depuis les années 1980, ce qui a entraîné son acidification. S’il continue d’absorber du carbone jusqu’en 2100, il deviendra toujours plus acide.
Ces bouleversements des océans ont des répercussions sur la répartition et l’abondance de la faune et de la flore marines. Les changements dans la répartition des populations de poissons ont réduit le potentiel de capture global. À l’avenir, ce potentiel diminuera encore dans certaines régions, en particulier les océans tropicaux, mais augmentera dans d’autres, telles que l’Arctique .
3- En haute montagne, la fonte des glaciers et de la cryosphère s’accélere
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La cryosphère désigne les régions gelées du système Terre: neige, glaciers, calottes glaciaires et plates-formes de glace, icebergs, glace de mer (banquise), glace de lac et de rivière, ainsi que pergélisol et sol gelé saisonnier.
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670 millions de personnes vivent dans les régions de haute montagne.
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Les glaciers, la neige, la glace et le pergélisol sont en déclin et continueront de l’être. Ce recul devrait accroître les risques pour les populations, comme les glissements de terrain, les avalanches, les chutes de pierres et les inondations.
Les glaciers plus petits d’Europe, d’Afrique de l’Est, des régions tropicales des Andes et en Indonésie, devraient perdre plus de 80 % de leur masse actuelle d’ici 2100 selon les scénarios d’émissions élevées
Le déclin de la cryosphère en haute montagne continuera d’avoir des répercussions négatives sur les loisirs, le tourisme et l’identité culturelle des populations.
À mesure que les glaciers de montagne reculent, ils modifient également la disponibilité et la qualité de l’eau en aval, ce qui a des répercussions sur de nombreux secteurs comme l’agriculture et l’hydroélectricité.
4- Recul de la banquise arctique, fonte du pergélisol
- 4 millions de personnes vivent en région arctique.
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L’étendue de la banquise arctique diminue et perd en épaisseur.
- Avec un de 1,5 °C, l’océan Arctique ne serait libre de glace en septembre (le mois où il y a le moins de glace) qu’une fois tous les cent ans.
- Pour un réchauffement de 2 °C, il le serait jusqu’à tous les trois ans.
Gelé depuis de nombreuses années, le pergélisol se réchauffe et dégèle. Sa fonte devrait être généralisée au XXIe siècle.
- Avec un réchauffement inférieur à 2 °C, environ 25 % du pergélisol de surface (3–4 mètres de profondeur) dégèlera d’ici 2100.
- Si les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter fortement, environ 70 % du pergélisol de surface disparaitrait.
Le pergélisol arctique et boréal renferme de grandes quantités de carbone organique, presque deux fois le carbone atmosphérique, et risque d’entraîner, s’il dégèle, une hausse considérable des concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.
5- La hausse du niveau de la mer pourrait atteindre 60 à 110 cm d’ici 2100
- 680 millions de personnes dans les zones côtières de faible élévation.
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La fonte des glaciers et des calottes glaciaires entraîne une élévation du niveau de la mer et les phénomènes côtiers extrêmes sont de plus en plus intenses.
Selon le rapport, alors que le niveau de la mer a augmenté d’environ 15 cm à l’échelle mondiale au cours du XXe siècle, cette hausse est actuellement plus de deux fois plus rapide – 3,6 mm par an – et continue de s’accélérer.
Le niveau de la mer continuera d’augmenter pendant des siècles. Cette hausse pourrait atteindre 30 à 60 cm environ d’ici 2100 et ce, même si le réchauffement planétaire est limité à une valeur bien en dessous de 2 °C. Il pourrait atteindre 60 à 110 cm si ces émissions continuent d’augmenter fortement.
6 – Certains États insulaires deviendront inhabitables
- 65 millions de personnes vivent dans de petits Etats insulaires en développement.
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L’élévation global du niveau de la mer augmentera la fréquence des valeurs extrêmes du niveau de la mer, à marée haute et pendant les grandes tempêtespar exemple.
Quel que soit le réchauffement supplémentaire, des événements de niveau de mer extrême qui se produisaient précédemment environ une fois par siècle se produiront chaque année d’ici 2050 dans de nombreuses régions.
L’intensification des vents et de la pluie associés aux cyclones tropicaux exacerbe les valeurs extrêmes du niveau de la mer et les aléas côtiers. L’intensité des aléas sera encore plus grande en raison d’une augmentation de l’intensité moyenne des cyclones tropicaux, de l’amplitude des ondes de tempête et de la pluviométrie qui y sont associées, en particulier si les émissions de gaz à effet de serre demeurent élevées.
Un rapport clé pour les dirigeants mondiaux
Le Rapport spécial du GIEC est un élément scientifique clé sur lequel pourront s’appuyer les dirigeants mondiaux lors des prochaines négociations sur le climat et l’environnement, telles que la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP25) qui se tiendra au Chili en décembre.
Pour l’élaboration du rapport, plus de 100 auteurs issus de 36 pays ont évalué les publications scientifiques les plus récentes liées à l’océan et à la cryosphère dans le contexte du changement climatique, référençant quelque 7 000 d’entre elles.
Samuel Morin, chercheur Météo-France, directeur du Centre d’Etude de la Neige, a contribué à l’élaboration de ce rapport spécial en tant que membre du groupe de travail du GIEC. Il fait également partie de l’équipe de rédacteurs du rapport aux décideurs.
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